Mes débuts dans le web : j’étais une vraie gamine !

Message préventif

Si vous êtes victime de harcèlement ou de dénigrement sur Internet, parlez-en aux adultes. Si vous êtes un adulte responsable qui entendez de la détresse, appliquez les mesures qui s’imposent pour tempérer les situations, de grâce. Le problème est de nos jours TROP GRAVE.

L’histoire : J’ai crée un site par haine

On a parfois du mal à vouloir s’imposer quand on est jeune, chercher par tous les moyens de satisfaire ses besoins primaires. Grâce au développement personnel, j’ai compris que le besoin de reconnaissance faisait partie de mon identité. Et c’était encore plus le cas sur les bancs de fac.

Remontons le temps. On est en 2000, j’arrive en première année de BTS Assistant de Direction (oui … je me suis suis dit allons là, on verra bien). Mon site amelieonline.net vient tout fraichement de sortir, souvent agrémenté de mises à jour plus ou moins ratées. Mais je venais de découvrir une passion (qui allait devenir vocation), et le soir, à peine rentrée dans mon studio, je me jette sur mon PC pour faire du développement, faire des sites annexes, bref, je m’amuse à découvrir HTML au lieu de faire mes devoirs. Mon cadeau de mes 18 ans, c’était un livre sur Dreamweaver (l’IDE le plus en vogue de l’époque) et sa licence. Oui, donc au moment des faits, j’ai 18-19 ans.

Je suis comme une folle. Je crée des tutoriels pour ma classe, et espère que le site aurait son petit succès. Je ne manque pas, lors de la présentation officielle devant ma classe, face à ma prof principale de parler de mon site. Je reçois des messages sur mon livre d’or, des bonjours, de ma prof et de mes camarades. Mais le site n’est pas trop visité, j’ai du mal à trouver mon style, à la fois sérieux et trop second degré. En même temps, mes camarades ne sont pas « geeks » dans l’âme, pendant que moi, je navigue dans le « Deuxième monde » de Canal+, ancêtre du « métaverse ».

L’affaire de la photo à scandale

Du coup, je balise, et profite du projet « journal des promos AD du lycée » dont j’ai la charge pour écrire un article et faire la pub, venez sur mon site il est cool. Mais il y a un hiatus.

Quelques jours avant la distribution du canard, en fin de page de mon site, je publie une photo accompagnée d’un commentaire, destinée à une personne (hors du lycée et sans la nommer) qui m’avait profondément blessée. Le site ressemblait donc à ça (désolée je n’ai plus d’archive de cette version, la seule trace c’est cette demi-page imprimée toute pixelisée) … j’ai flouté volontairement l’image en question, qui était récupérée sur le web et qui m’avait amusée.

C’était quand même, avec le recul, vraiment osé, je n’aurais jamais dû faire ça, d’autant plus qu’on a du mal à faire le lien entre l’annonce de l’histoire de la « personne dangereuse » et la photo qui l’accompagne. On peut vraiment croire que je me moque de mes lecteurs, que je cherche à les provoquer. Mais on peut se montrer bête quand on a 18 ans.

Et un soir, en rentrant, je reçois un mail de la part des deuxième année, qui me fait part de leur indignation, agrémenté d’un bon « t’as rien compris à la vie et certainement rien au c… ». Je me sens en colère car c’était plus caricatural et vindicatif que pornographique, mais je consens à enlever la photo fissa. Mais le mal était fait. Le week-end arrive, je suis chez maman et … coup de fil.

AIE. Ma prof principale. Donc je lui explique ma version des faits, elle se montre douce et compréhensive, mais qualifie mon acte de « potache » (ce qui en soit est vrai). Ma maman, témoin de la conversation, me donne une bonne engueulade aussitôt raccroché. Le lundi, tout le monde me tombe dessus, camarades et profs : « Vous imaginez demain si ça tombe en conseil de classe ? A l’annonce de votre nom? devant le directeur de l’établissement ? ». Mon moi de l’époque a ressenti pendant longtemps un gros sentiment d’injustice : « Comment, je mets des tutos, des choses utiles sur ce site, et tout ce qu’on retient, c’est cette stupide photo ??? M… alors, allez tous vous faire f…. !!! ». Oui, au lieu de remettre en question mon contenu, je remettais la faute sur les autres, facile.

L’affaire Loft Story

Quelques mois plus tard, nous sommes en 2001 et le Loft apparait. Je demeure toujours une geek asociale et aigrie, même si je fréquente assidument une bande de copines du lycée où j’ai passé le bac, et je communique sur IRC. Mais je n’apprécie pas les filles de ma promo. A l’époque je les jugeais superficielles, et elles me trouvaient trop bizarre (HPI es-tu là ?). D’autant plus que je traversais une période compliquée, je me posais des questions sur mes orientations amoureuses, bref je n’étais pas bien dans mes pompes.

Je progresse dans mes apprentissages du web, je crée une plate-forme accessible par login et mot de passe pour ma promo pour qu’elles aient du contenu un peu fun. Sauf qu’il y a eu un contenu pas du tout fun … sauf pour moi. Je crée pendant l’été un site annexe sur cette plate-forme, parodie du site du Loft, où je mets en scène les filles que j’apprécie le moins. Avec les mêmes graphismes, les mêmes codes de couleur que le site original, je m’amuse de ouf, paf, dans leur tête. Mais je n’en parle pas trop autour de moi, laisse les gens qui veulent bien le découvrir. Je pensais fermer ce site tôt ou tard, parce que certains propos allaient loin. Puis je méconnaissais le droit : même en accès « privé », le droit à l’image s’applique. J’allais même plus loin : mon prof de français, qui avait alors humilié le projet du journal devant la classe, prenait le rôle de Castaldi !

Puis vint le drame, en plein cours d’anglais, alors que je provoquais quelques voisines au lieu d’écouter la leçon, la déléguée souffle à ses voisines l’existence du site parodique. Là je vois les menaces directes des principales concernées. Ce que j’ai fait ? J’ai pris la fuite en plein cours, face à une prof désemparée, et file fissa à mon studio pour effacer toute preuve d’existence ce cette catastrophe qui se préparait. Et j’ai fait la morte pendant plusieurs jours, prétextant être malade auprès de la vie scolaire.

Bien sûr, à mon retour j’ai eu des comptes à rendre. Sincèrement, j’ai regretté ce site. Car entre-temps, nous vivions toutes la catastrophe AZF et ça nous avait rapprochées, et je m’étais montrée assagie dans ma virulence et mes jugements. Ce coup-ci, ma maman n’a eu aucun vent de cette affaire, il vaut mieux, pour elle et pour moi, car elle aurait vraiment été déçue.

Heureusement il y a eu ma prof principale qui a été là, car je suis allée direct lui confesser mes actes, et dans son attitude un peu maternelle envers moi, m’a alors défendue (même si elle ne cautionnait pas du tout mon « œuvre », normal), elle m’a conseillé de travailler sur mon besoin de vengeance, et a tempéré le conflit qui aurait pu aller loin. Beaucoup plus loin. Je l’en remercie encore et passe un bonjour à elle en passant. Nous sommes toujours en contact, des décennies après. Une femme adorable qui a su prendre le temps de m’écouter quand j’en avais besoin.

Pourquoi j’ai fait ça ?

Parce que j’étais une adolescente qui manquait de confiance et d’estime d’elle-même, en mal de reconnaissance et qui ressentait beaucoup d’injustice. Ancienne victime de harcèlement moral au collège et au lycée, je voulais absolument qu’on aime ce que je faisais, qu’on admire mon travail, quitte à basculer dans la provocation. Je subissais en parallèle du cyber-harcèlement sur IRC, des gens qui n’hésitaient pas, par simple gratuité de m’insulter, ce qui m’avait rendue à l’époque aigrie et très anxieuse. Je ne m’en sers pas d’excuse, j’avais tort sur toute la ligne. Mais la haine est un cercle vicieux, quand on est jeune, on a la haine quand on reçoit de la haine.

Le message final de mon moi actuel

Ce post se voulait au départ être une confession, confession de mes bêtises, de mon tempérament, du mal que j’ai pu faire.

De dire aussi que j’ai appris de mes erreurs. Et que la leçon à retenir c’est que tout créateur est responsable de son contenu, et qu’à ce jour, j’y suis très sensible.

Mais au fur et à mesure de l’écriture de ces lignes, j’ai beaucoup réfléchi sur cette histoire et l’actualité. Il y a autre chose à dire.

Aujourd’hui les temps ont changé, et le partage d’infos est plus facile. Il y a vingt ans, transmettre de l’info sur internet devait demander du travail. Il n’y avait pas les réseaux sociaux.

Et c’est ça qui est terrible, car ils sont vecteurs aggravants du harcèlement scolaire. Les jeunes qui ont recours à ces pratiques sont mal dans leur peau et ne se rendent pas compte qu’ils peuvent briser des vies ce faisant. Communiquer derrière un écran est facile, trop facile. Aujourd’hui des jeunes se suicident pour une page en trop, une phrase de trop. Ils n’ont plus de répit, aussitôt sortis du collège/lycée, ça continue sur leur téléphone !

Faites attention aux informations que vous véhiculez, elles peuvent causer beaucoup de mal.

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